Comment fonctionne une société écran ?

Par Christelle , le 2 septembre 2022 - 7 minutes de lecture
Société écran

De plus en plus d’entreprises choisissent de créer des sociétés écrans dans l’optique de gagner plus de bénéfices tout en optimisant leur fiscalité. En créant une société écran, un entrepreneur ou dirigeant d’entreprise peut pratiquer ce que l’on appelle « évasion fiscale ». Malheureusement, certains utilisent aussi des sociétés écrans pour mener des opérations de blanchiment d’argent. Qu’est-ce qu’une société écran et comment fonctionne-t-elle concrètement ? Comment faire pour en créer une ? Nous allons vous dévoiler tout ce que vous devez connaitre sur les fameuses sociétés écrans.

Définitions : société écran, paradis fiscal

Une société écran, par définition, est une société purement fictive immatriculée dans un pays étranger que l’on appelle « paradis fiscal » alors qu’elle n’y exerce aucune activité entrepreneuriale en réalité.

Un paradis fiscal est un pays à fiscalité limitée. Selon l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), on peut qualifier un pays de paradis fiscal s’il respecte quatre critères principaux :

  • Les impôts sur les sociétés étrangères sont très faibles, voire inexistants.
  • Le système juridique et fiscal sur le territoire est opaque, c’est-à-dire qu’il y a absence de transparence.
  • La législation empêche ou trouble l’échange d’informations avec les autres pays.
  • Les sociétés offshores y sont les bienvenues et le pays tolère assez bien l’implantation de sociétés écrans ayant une activité fictive sur son territoire.

Société écran : principes et fonctionnement

Comme évoquée précédemment, une société écran est une société fictive qui est utilisée par son propriétaire pour dissimuler ses transactions financières. Pour mieux l’appréhender, il faut comprendre que la création de ce type de société permet en effet de mettre en place un écran (comme son nom l’indique) entre l’entreprise existante, celle menant une véritable activité commerciale, et la juridiction dans laquelle les bénéfices qu’elle génère devraient être imposés. Cet écran dressé entre les deux parties permet au propriétaire de la société écran de bénéficier d’avantages fiscaux dans le paradis fiscal dans lequel celle-ci est immatriculée.

Pour illustrer, imaginons une entreprise basée dans un pays à haute fiscalité comme la France par exemple. Le fait est que plus elle génère des profits et plus elle doit verser des impôts élevés à l’État français. Pour limiter ses charges fiscales, elle décide de créer une société écran qu’elle immatricule dans un paradis fiscal. Dans ce pays à fiscalité faible ou inexistante, la société fictive se matérialise uniquement par une boite aux lettres (boite postale) qui y est installée de façon stratégique. La société écran y bénéficie alors d’avantages fiscaux et son propriétaire a la possibilité de générer des revenus plus importants à cause des charges fiscales allégées. En contrepartie, elle a l’obligation de verser des frais à l’État concerné (l’État de résidence de son entité écran), et ce, à chaque année d’exercice.

Si l’on observe le fonctionnement et la finalité d’une société écran, on pourrait en venir à la conclusion qu’il s’agit d’un acte illégal et pourtant, ce n’est pas le cas. Pour rester conforme à la loi, il est important d’agir en toute transparence. Dès que vous ouvrez et utilisez un compte bancaire étranger lié à votre société fictive, il faut faire parvenir une déclaration au fisc. L’idéal lorsque vous souhaitez créer une entité écran, c’est de solliciter les conseils d’un professionnel en fiscalité et en finances.

Il est à noter que certaines personnes sans scrupules font usage des entités écrans pour mener une opération de blanchiment d’argent. Cela consiste à blanchir de l’argent sale obtenu par un acte frauduleux, criminel ou délictueux. Comme une entité écran permet de cacher les agissements de son propriétaire, les malfaiteurs en profitent pour réintégrer cet argent sale dans le circuit légal. Un tel acte est par contre illégal.

Quelle est la différence entre les sociétés écrans et les sociétés offshores ?

Les sociétés écrans sont souvent confondues avec les sociétés offshores. Par définition, une société offshore est une entreprise qualifiée d’extraterritoriale, c’est-à-dire qu’elle est implantée dans un pays étranger. Tout comme l’entité écran, l’entreprise offshore est immatriculée dans un paradis fiscal alors que son créateur n’y réside pas. Toutes deux y profitent alors des avantages fiscaux offerts par le pays aux non-résidents.

La différence réside dans le fait qu’une société écran est créée dans l’unique but de bénéficier d’avantages fiscaux (moins d’impôts, voire exempte d’impôts) dans le paradis fiscal alors que la création d’une entreprise offshore a bien d’autres finalités que l’évasion fiscale.

Création d’une société écran : quelles sont les démarches à suivre ?

La création d’entités écrans n’est pas si compliquée à l’instar de la création d’entreprises qui existent réellement. Les démarches sont assez simples : il suffit d’implanter une boite aux lettres dans le pays à fiscalité réduire pour matérialiser votre société fictive.

Si vous souhaitez mener à bien la création de votre entreprise fictive, il est vivement conseillé de vous faire accompagner par votre avocat ou votre banquier pour choisir le paradis fiscal le mieux adapté à vos besoins et attentes. Parmi les paradis fiscaux, on peut citer :

  • Monaco
  • Les Bahamas
  • Dubai
  • Le Royaume-Uni
  • Malte
  • L’île Maurice
  • La Bulgarie
  • Andorre
  • Les Bermudes

Une fois ce choix effectué, votre intermédiaire échangera avec un agent responsable des domiciliations dans le pays sélectionné afin de lancer les procédures de domiciliation de votre entreprise fictive. Dès lors que votre entité écran est créée, vous utiliserez des prête-noms pour agir en tout anonymat et des titres au porteur pour transférer des fonds en toute rapidité et discrétion.

À savoir sur les entités écrans

En décembre 2021, la Commission Européenne a publié une proposition de directive dont le principal objet est de lutter contre l’utilisation abusive des sociétés écrans. Jugeant l’évasion fiscale comme une pratique impactant négativement sur l’économie et la société en général, elle suggère de prendre des initiatives d’encadrement des entités écrans, notamment au moyen de trois critères spécifiques. Si une entité remplit l’ensemble de ces critères, elle se verra assujettie à une nouvelle obligation de déclaration et ne sera plus éligible aux différents avantages fiscaux.

À noter que ces nouvelles dispositions, lorsqu’elles seront mises en place, ne concerneront que les États membres de l’Union européenne (dont France). Ainsi, toute société immatriculée dans un pays d’Europe ne pourra plus pratiquer d’évasion fiscale, de fraude fiscale ni de blanchiment d’argent. Comme le dit clairement le vice-président exécutif de la Commission Européenne : « Chacun devrait payer sa juste part d’impôts ! ».